La 2ème à gauche, c’est moi, en mars 2001 en Inde, dans le bureau d’un vieux sage, enclin à faire méditer les occidentaux qui passaient par là.
J’ai l’air heureux et serein sur la photo, mais ne nous y trompons pas – dans ma tête c’était la tempête !!
J’avais alors tellement d’attentes et de clichés en tête concernant la méditation. Je crois sincèrement qu’à l’époque j’imaginais qu’après quelques heures, ou peut-être quelques jours d’assise tranquille, j’allais rencontrer l’extase, léviter peut-être même… ou tout au moins voir léviter mon enseignant. A ma décharge, je venais d’un milieu où la méditation était totalement absente, perçue comme un truc de babas cool (sans doute drogués de surcroit) qui cherchaient à atteindre un paradis dont je ne savais rien. J’avais passé les 15 précédentes années de ma vie à travailler à m’en faire mal pour réussir de belles études et gagner ma vie dans de grandes entreprises où l’on parlait objectif, performance, résultat, efficacité... Un monde dans lequel je fonctionnais plutôt bien mais qui me laissait une sensation de vide dans le corps et dans le cœur. Un vide que je comblais en allant chercher ailleurs ce qui donnait plus de sens à ma vie, d’où ce voyage en Inde et l’envie de méditer avec un Guru (c’est le nom qu’on donne aux enseignants là-bas). J’étais surexcitée à l’idée de faire cette mini-retraite. La surexcitation et la méditation ne faisant pas bon ménage, mon esprit s’en donnait à cœur joie. D’autant que le dit Guru parlait un anglais plus qu’approximatif, que je ne comprenais rien à ce qu’il fallait faire et moi quand je ne comprends pas, ça s’agite dans ma tête (ça va mieux maintenant : après 20 ans de méditation, j’accepte enfin, et encore pas toujours, de ne pas savoir, de ne pas comprendre). Et puis, il faut bien l’avouer : au fond de moi, et malgré toute l’envie que j’avais d’être là, j’étais inquiète. Qu’allait il m’arriver si j’atteignais ce nirvana ou, plus modestement, si je lâchais prise comme Guruji nous invitait à le faire ? Est-ce que je pourrais rentrer vivre chez moi ou aurais-je juste envie de rester méditer sur les bords du Gange ? Je venais tout juste de me marier. Qu’en dirait mon mari ? Et mon boss, qui comptait évidemment sur moi ?
Je vous épargne la description intégrale des innombrables circonvolutions de mon mental en lutte avec l'intention du moment : arrêter de faire, de vouloir, de contrôler pour suivre simplement mon souffle.
Mon mental résistait tellement que mon corps a fini par l’écouter ! Alors que nous faisions essentiellement des pratiques en lien avec la respiration, mon nez s’est bouché, ne se libérant par intermittence que pour couler à grand flot. Et me voilà méditant tour à tour avec un morceau de camphre pur sous le nez (décongestionnant très efficace offert par le Guru) ou un kleenex pour absorber ce flot de larmes nasales continues. J’étais mortifiée que mon corps ne me permettre pas d’être à la hauteur de l’enjeu. Comment atteindre la moindre extase dans ces conditions !? (J'ai choisi de vous partager cet épisode peu reluisant de mon passé de méditante pour témoigner que la méditation, c'est aussi une affaire de patience et de ténacité ... ) Je suis rentrée chez moi un peu déçue mais heureuse d’avoir osé vivre cette expérience et bien décidée à ne pas laisser tomber la méditation dont j’avais déjà l’intuition profonde des bienfaits qu’elle me procurerait. J’ai donc continué à méditer, à la faveur de mes rencontres, de mes voyages (je vivais en Chine à l’époque et il n’y avait pas encore toutes les « app » disponibles maintenant). Des rencontres parfois un peu trop dingues (un jeune maitre qui disait s’adresser à nous dans une langue extra-terrestre) ou trop austères (ce maitre qui s’assied sans un mot, et repart après de longues, longues, longues minutes, toujours sans mot dire).
Pour autant, j'aimais ces instants où je me sentais paradoxalement très présente, très vivante alors que je ne « faisais rien ».
J’aimais ces moments où seule avec moi-même ou sous la guidance d’un enseignant, je tentais de faire la paix avec mon esprit sur-actif. Ces moments, même fugaces, où je pouvais me déposer, m’autoriser à lâcher un peu la pression que je ou d’autres m’imposaient au quotidien. Ces moments où la simple sensation de mon corps en vie me remplissait de joie.
10 ans plus tard, peu après être rentrée vivre en Europe, j’ai participé à mon premier programme MBSR (Minfulness Based Stress Reduction - réduction du stress basé sur la pleine conscience).
Ce fut une véritable révélation : une synthèse de sagesses ancestrales et de sciences modernes.
J'y retrouvais des pratiques fondamentalement similaires, guidées avec des mots plus accessibles. Les exemples se reliaient directement à ma vie, à ma culture. En territoire plus familier, rassuré par les apports scientifiques, mon esprit qui doute et questionne si souvent pouvait se laisser aller, en confiance. J'y trouvais aussi le soutien et l'enrichissement d'un groupe de personnes différentes, certes, mais qui partageaient avec moi, l'envie de questionner leur façon d'être au monde. Petit à petit, par la pratique et les explorations proposées, je découvrais tout ce que le programme MBSR et son cheminement si spécifique met en lumière.
Je prenais conscience que j’avais une influence bien plus grande que je ne le pensais sur la façon dont je vivais et ressentais ma vie. Ce n’était plus simplement les conditions extérieures, plus ou moins difficiles, qui s’imposaient à moi. Je pouvais retrouver une part de liberté et de détente dans la façon dont j’accueillais les événements.
Quel soulagement ! Que de possibilités nouvelles s'offraient à moi
là où je me sentais coincée, enfermée dans mes façons de faire et de vivre.
Je ne suis pas sûre que ces transformations intérieures aient été perçues par mon entourage à cette époque mais dans mon vécu, quelque chose s'était transformé. Incontestablement. Quelque chose qui me paraissait si fondamental à connaître, en tant qu'être humain, que j'ai ensuite choisi de me consacrer à son étude, à son apprentissage et à sa transmission.
Avec une curiosité sans cesse renouvelée et une immense gratitude pour tous les enseignants, rencontrés sur ce chemin.
Si à votre tour, vous êtes tenté.e par l'aventure intérieure d'un programme MBSR, ou tout simplement par la découverte de la méditation, vous trouverez les activités proposées ici.
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